vendredi 20 novembre 2015

L’art d’acheter une paire de chaussures 1

L’art d’acheter une paire de chaussures 1


Samedi 14h30:

Comme à mon habitude, je flâne dans les rues de la Capitale.
Objectif : Me désennuyer.

Je déambule sur les pavées de la rue Saint Honoré. Je dois avouer que j’ignore même comment j’ai fait pour y arriver. Je me rappelle être sortie rue du Louvre et ensuite trou noir.
Je vous explique: Je n’ai aucun sens de l’orientation, les rues sont pour moi un enchevêtrement de lignes verticales et horizontales, parfois parallèles ou perpendiculaire. Le tout agrémenté de point vert et de petits traits blanc (ils appellent ça espace  vert et passages piétons). En plus, chaque sortie est pour moi une nouvelle découverte. J’ai toujours l’impression de partir à l’aventure.

Un plan ? Ce n’est pas pour moi, je ne saurais même pas dans quel sens le tenir !
Mais je n’ai aucune inquiétude: Comme on dit tous les chemins mènent à Rome.

Et puis je possède des capacités et des gadgets insoupçonnés :
- Je sais lire (Tout sauf les cartes, les plans et les panneaux de signalisation).
- Un Smartphone avec GPS intégré dont je n’ai jamais compris l’utilité. (Il y a une flèche rouge qui tourne en même temps que moi. Est-ce l’arrivée ou la destination ? Question élémentaire mais qui ne possède toujours  pas d’explications à ce jour).
- Un super sens du contact client : Si je me perds pas de soucis. Je peux toujours demander aux passant qui m’abreuvent d’explications plus nébuleuses les unes que les autres (Sérieusement à partir du second feu rouge, je perds systématiquement le fil de la conversation. J’hoche poliment et automatiquement la tête avec l’air le plus intéressé et le plus intelligent dont je suis capable), les phrases courtes, ils ne connaissent pas.
Donc, je déambule je ne sais où dans la rue. Je tourne à droite, puis à gauche, je goutte une falfelle (Un beignet au pois chiche libanais) qu’un des vendeurs du restaurant propose aux passants sur un plateau. Trop salé pour moi.
C’est fou le nombre de restaurants qui se trouve sur cette rue.

 Après plusieurs minutes durant lesquelles je m’amuse à faire des tours et détours, (Le chemin à suivre est trop court pour moi et j’ai du temps à perdre), je me pétrifie.
Je suis devenue à mon tour l’une des victimes de Sthénno (Oups, je crois qu’il s’agit de Méduse en fait).
Devant  moi se trouve une boutique. En elle-même la boutique n’a rien pour elle : Petite, sombre,  glauque, pas d’ampoules éclairantes, pas de strass, pas d’enseigne.
Elle ressemble en tout point à ces boutiques/épiceries de troisième zone  et qui dix ans plus tard sont toujours debout sans aucunes explications. Je les appelle les « Survivantes » car elles ne ferment jamais. Été comme hiver, mois après mois, année après année, elles sont toujours là. Elles survivent à tout même à la crise économique.

Situé tout au bout de la rue, le local semble s’être égaré par erreur, c’est l’intrus du quartier. En résumé, rien d’extraordinaire ou même d’exceptionnel à noter sauf peut-être… cette magnifique que dis-je ! SUPRÊMEMENT ORIGINALE paire de chaussure.

Les plus belles de toute ma vie !
Ma quête viendrait-elle de prendre fin ?

De sublimes sandales noires et argentés. Un croisement entre la bottine et la spartiate. (La génétique ça a du bon. Certains croisements de chromosomes sont vraiment réussis). Elles sont munies de brides en cuir noir à boucle argenté sur la cheville. Les talons de douze centimètres sont un empilement de ressort métallique légèrement rouillé et donne au corps une allure rock et vintage. Une petite lanière en cuir tressé  maintient l’extrémité du pied.
A cet instant, l’expression «  de battre mon cœur s’est arrêté », prend tout son sens devant tant de magnificence. Au bout de la troisième seconde, je pense enfin à remettre mon appareil respiratoire en route. J’inhale de l’air.
Je réalise que mes jambes sont prises de tremblements compulsifs. J’essuie mes mains devenues moites sur mon jean Diesel. Mon cœur tambourine si fort que j’ai l’impression qu’il s’apprête à sortir de ma poitrine pour s’écraser sur la vitrine et si possible y baver tout son saoul. (Vous avez toutes vue THE MASK avec Jim Carrey ?) Et croyez-moi mon cœur sait faire du lèche vitrine. Après tant d’années de pratique, il est passé pro.
Il dit « je t’aime ! Toi viens que je te serre dans mes bras.»
 Vous avez compris l’idée.

Une fois le premier choc passé, je me ressaisis et me résout enfin à bouger. Pas pour aller bien loin. Je me contente de trois pas et me retrouve à la porte de la boutique. Je presse la poignée de métal.

FERME !
Horreur… !

Je recommence une seconde fois au cas je n’aurais pas mis assez de force à la première tentative. Ma main sur le fer froid, je pousse de toutes mes forces. Toujours rien. Je colle mes yeux à la vitre sale et froide. Je ne vois pas grand-chose, c’est peut-être dû à la saleté. Je souffle sur la vitre et frotte de toutes mes forces. Je plisse les yeux. Toujours rien
Je m’aperçois que des passants me jettent des regards étranges, soupçonneux. Je force un sourie crispé, consciente que je puisse leur paraitre étrange. Peut-être me prennent-ils pour une voleuse venue identifier le lieu de son futur braquage ?
- La vitre est bien plus propre maintenant, j’ajoute avec un air enjoué en montrant ma main ganté de noir (Moi qui voulait montrer patte blanche).
Ça y’est on me prend pour une folle ! D’une minute à l’autre je verrais apparaître la police. J’attends quelques secondes que la rue soit de nouveau vide puis reporte mon attention sur la boutique.
A nous deux :
On en étions-nous déjà ?
C’est à ce moment-là que je LA vois. La plaque à la peinture bleue écaillé, à peine visible.

Horaires d’ouvertures
Ouvert :
Mardi - vendredi
10H -18H30
Samedi
10H -14H
Fermé :
Dimanche - Lundi

Toute ma joie de vivre s’envole comme par magie. J’en reste stupéfaite. Jamais je n’avais vu de tels horaires. Ce sont des horaires de Banque avec un grand B. Quelle boutique digne de ce Nom est fermée un Samedi après-midi ? C’est porter une attaque directe au commerce international, une atteinte aux valeurs économique du pays !

Je plaque mes mains contre la devanture. Maintenant je suis désespérée.


Round 1:

MOI VS BOUTIQUE :
=
GAME OVER


Je viens d’atteindre sans aucuns doutes les affres de la plus profonde désespérance. Je dois attendre jusqu’à Mardi. Mardi ! J’aurais le temps de mourir jusque-là et je m’éteindrais en pensant à cette paire de chaussure. Mon œuvre inachevée. Ensuite je reviendrais sous une forme ectoplasmique hanter cette boutique.
Je ne veux pas devenir un fantôme triste ! Et la boutique est si rasoir ! L’éternité ne va pas être marrante à ce train-là !
 A ce moment-là, la réalité me percute de plein fouet. C’est impossible ! Mardi, je travaille. Je débute à 8h45 pour terminer à 18h05 et il me faut compter plus d’une heurede trajet.
J’ai l’impression de passer sous un rouleau compresseur. Non  attendez! Je viens juste de me faire percuter par un camion lancé sur l’autoroute A1 à pleine vitesse !
À l’intérieur de moi, une étrange boule prend forme au niveau de mon estomac. Je les veux ! Ça y’est le chakras envahit mes tenketsu.

- JE LES VEUX ! Hurle mentalement mon cerveau.

Ces chaussures sont devenues pour moi un défi.
Et je les aurais !


TO BE CONTINUED…

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